Dans le quartier Lumumba, au centre d’Uvira, le marché bruisse de voix et de pas pressés, mais derrière cette animation, la méfiance se lit sur tous les visages.
« Je ne reconnais plus mes voisins », confie madame Kambale, les yeux baissés. « Hier encore, mon voisin a refusé de me serrer la main parce qu’il croit des rumeurs. C’est triste… » Les habitants avancent avec prudence, scrutant chaque geste.
Dans un café voisin, monsieur Ntamushobora, médiateur communautaire, observe la scène. « Ici, les malentendus se multiplient », dit-il en secouant la tête. « Beaucoup veulent blâmer l’autre communauté pour leurs malheurs, et ça nourrit la colère et la méfiance. Nous devons rappeler que chaque individu compte et que la paix se construit ensemble. »
À l’Université d’Uvira, Joseph, 22 ans, exprime le sentiment d’une jeunesse fatiguée des divisions. « On nous dit toujours “toi contre eux”, mais nous voulons penser autrement. On veut apprendre à se respecter, pas se combattre », dit-il, entouré de camarades qui hochent la tête en silence. Pour eux, s’émanciper des discours polarisants est devenu un acte de courage.
Dans le quartier Katogota, des ateliers interculturels rassemblent des jeunes des différentes communautés. Béatrice, coordinatrice d’un projet de paix, raconte : « Au début, ils étaient méfiants. Mais quand ils partagent leurs histoires, leurs douleurs et leurs espoirs, on voit des ponts se créer. » Un jeune participant ajoute : « Avant, je pensais que certains étaient mes ennemis. Maintenant, je comprends qu’on peut vivre ensemble et s’entraider. »
Les habitants plus âgés ont aussi des leçons à transmettre. Monsieur Mubalama, 58 ans, parle d’expérience : « J’ai traversé plusieurs crises dans cette ville. Ce qui nous sauvera cette fois, c’est notre humanité. On doit écouter, parler et ne pas laisser la haine guider nos choix. » Son regard, empreint de gravité et de détermination, semble inviter chaque jeune à réfléchir.
Alors que le soleil décline sur Uvira, la ville garde cette atmosphère de tension mêlée d’espoir. Les voix des habitants résonnent comme un appel : dépasser les divisions, privilégier le dialogue et reconstruire la confiance. Ici, le vivre-ensemble n’est pas un idéal abstrait, mais un défi quotidien et vital pour que la paix et la cohésion sociale s’installent enfin durablement.